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Nestlé : le DG Laurent Freixe limogé ; bon débarras pour les investisseurs ?

Le géant agroalimentaire suisse Nestlé a limogé lundi 1er septembre son directeur général Laurent Freixe, accusé d’avoir enfreint le code en raison d’une relation amoureuse non déclarée avec une salariée. Pour les investisseurs, ce départ brusque est peut-être une bonne nouvelle alors que le groupe a perdu 17% de sa valeur en Bourse depuis l’entrée en fonction du dirigeant français, il y a un an.

Laurent Freixe, directeur général de Nestlé, a été limogé le lundi 1er septembre pour non-respect du code de conduite interne à l’entreprise. Il est accusé d’avoir eu une relation amoureuse non déclarée avec une salariée, donc une subordonnée directe. Entré en fonction en septembre 2024, après l’éviction de Mark Schneider, le Français a été remplacé dans la foulée par le Suisse Philippe Navratil, étoile montante qui avait pris la direction de Nespresso en juillet 2024.

Scandale sur scandale ces dernières années

Malgré 39 ans passés chez Nestlé, Laurent Freixe ne recevra aucune indemnité de départ après son limogeage. Dans une brève déclaration, Paul Bulcke, le président du groupe, a remercié le dirigeant français pour ses années de service chez le géant agroalimentaire, mais a déclaré que son licenciement était une « décision nécessaire » dans le contexte actuel.

En effet, Nestlé sort de deux épisodes scandaleux ayant terni son image. En 2022, l’entreprise a dû faire face à l’affaire des pizzas contaminées de la marque Buitoni, qui avaient causé la mort de deux enfants. Et plus récemment, elle a été confrontée au scandale du traitement des eaux minérales, révélé par la cellule investigation de Radio France.

Nestlé veut montrer qu’il respecte ses valeurs

S’il n’y a aucune relation directe entre ces affaires, ça en fait un peu trop pour une même société en l’absence de trois ans. Le conseil d’administration a donc jugé bon de frapper rapidement pour éviter de nouvelles turbulences. L’objectif ultime est de se refaire une virginité en montrant que Nestlé a des valeurs internes et tient à les faire respecter.

Mais cette décision de l’industriel de licencier son directeur général pour une relation amoureuse non déclarée pourrait finalement avoir des effets négatifs. En effet, la ficelle paraît un peu grosse pour ne pas la voir. Si Nestlé a triché pendant des années, notamment avec ses eaux Perrier, Vittel ou Contrex, personne ne peut vraiment croire qu’elle est à cheval sur les bonnes mœurs.

Nestlé voulait-il se débarrasser d’un dirigeant dont il ne voulait plus

Par ailleurs, même si l’amourette du désormais ancien CEO est contraire au règlement interne de Nestlé, sa révocation pourrait être perçue par le grand public et la clientèle comme un moyen de se débarrasser d’un dirigeant dont on ne voulait plus. Une telle opinion semble fondée d’autant que de nombreux DG ont eu ce genre d’aventures sans perdre leur poste. Aux Etats-Unis, par exemple, seulement 2 % des directeurs généraux débarqués depuis 2017 l’ont été pour une relation amoureuse avec une subordonnée, selon des données du site exechange.com.

Laurent Freixe ne faisait pas recette

Si les dirigeants sont limogés, c’est avant tout parce que leur départ était planifié à cause de leur âge avancé ou pour des convenances personnelles, ou encore parce que leurs résultats financiers étaient en deçà des attentes des investisseurs. Et justement, Laurent Freixe ne faisait pas recette. Depuis sa prise de fonction, il y a un an, le titre de Nestlé a perdu 17%.

Pire, la valeur boursière de ce géant mondial de l’agroalimentaire (avec 2000 marques, dont Nescafé et KitKat) a fondu de près d’un tiers principalement sous sa houlette. Ainsi, à l’annonce de son départ, les marchés sont restés quasiment de marbre. L’action du groupe propriétaire avait d’emblée chuté de plus de 2% à la Bourse de Zurich, avant de se stabiliser, lâchant 0,7% à la clôture mardi.

Nestlé a besoin de retrouver sa stabilité d’antan

D’après Maurizio Porfiri, directeur des investissements de la société de négoce Maverix, « le marché n’a pas particulièrement apprécié Freixe, et les objectifs de restructuration ont également été mis en veilleuse ». Il estime qu’un nouveau départ s’impose et qu’« il est temps qu’une plus grande stabilité revienne à la direction de cette entreprise mondiale », après un an de fortes turbulences.

« Ce n’est pas la façon de faire de Nestlé (de changer autant de DG) », a reconnu Jon Cox, analyste chez Kepler Cheuvreux, qui espère que le nouveau changement « les remettra dans le droit chemin ». Mais les analystes craignent que le nouveau DG Philipp Navratil puisse être « coincé » par la stratégie de redressement de Laurent Freixe, à un moment où le marché reste sceptique. Ils redoutent également une nouvelle période d’instabilité après le départ annoncé du président de longue date Paul Bulcke en 2026.